Retour aux articles
Sommaire
h2
h3
h4
h5
h6
Retour aux articles

Réussir une négociation commerciale

Rédigé par
Pierre Marchès
,
CEO
Une négociation commerciale ne s'improvise pas. Contrairement aux croyances populaires, un bon négociateur n'est pas une personne qui dispose d'un talent inné, mais une personne qui s'est préparée.

La gestion de contrats est souvent associée aux étapes d’après-signature, c’est à dire le rangement d’un contrat au sein d’une contrathèque, ou encore le suivi de son exécution. Or, pour qu’un contrat puisse faire l’objet d’un archivage ou encore d’un suivi, faut-il encore que ce dernier ait été négocié et conclu.

La négociation de contrat fait donc partie des différentes étapes de gestion de contrats. Il s’agit peut être même de l’étape la plus importante, puisque de l’issue de cette négociation dépendra une partie de votre cycle d’exploitation tant en termes de marges, que de calendrier, affectation de ressources, etc.

Comment réussir une négociation commerciale ? Quelles sont les principales étapes à suivre pour une négociation de contrats réussie ? On vous livre quelques secrets dans cet article :

1. Connaître son style de négociation

Aussi surprenant que cela puisse paraître, il existe bel et bien des styles de négociation.

Selon une étude américaine, publiée par la Harvard Business Review, les styles de négociation (le vôtre mais aussi celui de vos cocontractants) seraient responsables de près de 30% de votre performance de négociation ! Inutile de préciser que connaître son propre style et identifier celui de son cocontractant doit faire partie de vos top priorités.

Beaucoup d’études et experts convergent autour de 5 principaux styles de négociation : la compétition, l’évitement, la collaboration, l’accommodation, et le compromis. Ces différents styles sont récapitulés dans le graphique ci-dessous :

Chacun de ces styles présente, bien entendu, des forces et des faiblesses. Pour illustrer cela, le compétiteur est très persuasif et concentré sur son objectif, mais en contrepartie peut être perçu comme trop insistant et manquant d’empathie.

Il est donc primordial de bien se connaître, afin d’être conscient de ses forces mais aussi de ses faiblesses, pour éviter de commettre des impairs le jour J.

A cet effet, un des moyens les plus efficaces consiste à poser la question à votre entourage, qu’il s’agisse de vos proches ou de vos collègues. Si vous avez besoin d’un support, il existe de nombreux tests gratuits en ligne. Ce test (en anglais) vous permettra par exemple de connaître vos grands traits de négociation et de vous comparer avec le panel de lecteur.

2. Préparer sa négociation

Maintenant que vous vous connaissez, il est temps de rentrer dans le vif du sujet.

La négociation d'un contrat peut souvent s'apparenter à une partie d'échecs, avec de l’anticipation, de la stratégie, et une connaissance approfondie des règles du jeu et du contexte. Certains auteurs nous invitent même à "contrôler la négociation avant même qu’elle ne commence".

Ce contrôle résulte d’une bonne préparation. Quatre éléments sont ainsi essentiels pour bien se préparer : la logistique, la connaissance de votre cocontractant, la fixation d'objectifs et l'importance de s'entourer des bonnes personnes.

A. Les aspects logistiques

Cela peut sembler trivial, mais la première étape pour préparer votre négociation est de bien connaître le cadre et appréhender les éléments logistiques. Où aura lieu la négociation ? Aura-t-elle lieu en personne ou à distance ? Qui seront les parties prenantes à la négociation ?

Chacune de ces questions entraîne des réponses à considérer comme des paramètres, avec des avantages et inconvénients. Par exemple, la négociation physique favorise l'établissement de liens plus forts ainsi que la lecture du langage corporel, mais elle peut engendrer des questions logistiques (qui n’a jamais oublié son adaptateur HDMI en réunion ?) et vous entraîner loin de votre zone de confort, par exemple si la réunion a lieu dans les splendides locaux intimidants de votre cocontractant.

A l’inverse, les négociations à distance laissent moins de place au traditionnel (et essentiel) « chit-chat » qui précède et suit la phase de négociation, mais offre plus de flexibilité et permet de maîtriser un cadre de bout en bout. Assurez-vous de choisir le mode qui vous convient le mieux en fonction de vos besoins et de ceux de votre cocontractant.

B. La connaissance de son cocontractant

Pour bien négocier, il est essentiel de comprendre l'autre partie. Quels sont ses objectifs ? Combien seront-ils à la table des négociations ? Quelle est leur réputation en affaires ?

En rassemblant autant d'informations que possible sur votre cocontractant, vous serez en mesure de formuler une stratégie de négociation sur mesure s’adapte aux caractéristiques de votre cocontractant, afin de ne pas commettre d’impair.

Les informations que vous recherchez ne doivent pas nécessairement être purement transactionnelles - elles peuvent également concerner le style de communication ou de négociation de votre cocontractant.

C. Avoir des objectifs et limites clairement définis

Avant de commencer à négocier, il est crucial de définir vos propres objectifs. Qu'est-ce que vous voulez obtenir de cette négociation ? Ces objectifs peuvent être quantitatifs (par exemple, acheter ou vendre un certain volume), monétaires (négocier un taux de marge, sécuriser une prise de commande) ou même relationnels (établir un partenariat à long terme).

Il est tout aussi important de connaître vos limites ! En effet, jusqu'où êtes-vous prêt à aller dans la négociation ? Etes-vous prêt à passer à côté d’un deal ? A froisser votre cocontractant ? Cette étape est souvent appelée « BATNA » pour « Best Alternative to a Negociated Agreement ». Cette méthode consiste à se poser, en amont, des questions afin de disposer d’une stratégie de repli en cas d’échec des négociations. Ces questions peuvent être :

  • Quelles seraient les voies alternatives en cas d’échec de la négociation ? Idéalement, il faut attribuer une note à chacune de ces options
  • Quelle est l’option la plus défavorable que je suis prêt à accepter ? Ce sentiment est-il partagé par mon organisation ?
  • Quel est selon vous le « BATNA » de votre cocontractant ?

En définissant vos objectifs et vos limites à l'avance, vous serez mieux équipé pour naviguer dans la négociation et faire des concessions stratégiques.

D. Demander de l'aide

La négociation d'un contrat ne se fait pas en solo, même si vous êtes l'interlocuteur principal. Selon le sujet et l’importance de la négociation, il peut être nécessaire de s'entourer d’ingénieurs, de financiers ou encore de juristes. Ils peuvent vous aider à comprendre les enjeux complexes, à éviter les pièges potentiels et à prévoir les conséquences à long terme de chaque décision prise pendant la négociation.

Ces experts peuvent vous aider à affiner votre stratégie de négociation, à clarifier vos objectifs et à évaluer les propositions de l'autre partie.

Assurez-vous donc d'avoir à vos côtés une équipe bien rodée et compétente qui partage votre vision et qui est déterminée à atteindre vos objectifs.

3. Assimiler quelques méthodes de négociation

La négociation est un art ! Elle demande de la finesse, de l’adresse, et surtout, de la connaissance. En effet, certaines personnes pensent que la négociation est une qualité qui relève de l’inné, alors qu’elle requiert beaucoup d’expérience et de préparation.

Alors, comment réussir sa négociation pour obtenir les meilleurs termes possibles pour son contrat ? Il existe des méthodes éprouvées, utilisées par les experts, pour réussir des négociations. Voici déjà quelques conseils qui pourraient vous être utiles.

A. Adopter la bonne attitude

La négociation ne se résume pas seulement à la conversation que vous tenez autour de la table (ou derrière un écran). Bien au contraire, votre attitude et votre comportement peuvent jouer un rôle déterminant dans la manière dont les négociations se déroulent. Dans son (célèbre) livre « Le Prince », Machiavel indiquait que « si un leader ne peut être à la fois aimé et craint, alors il vaut mieux être craint ». Appliquée aux négociations, cette approche est contestable, puisque de nombreuses études démontrent qu’une attitude positive augmente significativement la confiance et facilite la conclusion de contrats.

Il n’y a pas d’attitude unique à adopter en toutes circonstances, mais plutôt une posture d’écoute, de respect et d’adaptation au caractère et au style de négociation de vos cocontractants.

Sun Tzu, dans l’Art de la Guerre, parle d’attitude en ces termes : « il incombe au général d’être serein, impénétrable, impartial et maître de lui ». Transposée à l’art de la négociation, cette phrase récapitule assez justement l’attitude à adopter lors de négociations.

B. Maîtriser le temps

Dans une négociation, le temps est soit votre meilleur allié, soit votre pire ennemi. Lorsque vous avez le temps de tester plusieurs approches, explorer des alternatives, itérer sur des versions de contrats, alors vous avez de bonnes chances de mener vos négociations avec réussite.

Une autre étude américaine publiée dans l’International Journal of Conflict Management a ainsi permis de mettre en évidence un fort lien de cause à effet entre la pression mise sur un négociateur pour conclure un contrat rapidement et sa propension à faire des concessions et coopérer.

Par ailleurs, la gestion du temps dans les négociations est un sujet encore plus crucial en cas de négociations interculturelles, puisqu’il est démontré depuis longtemps que les américains, ouest-européens, africains ou encore asiatiques n’ont pas le même rapport au facteur temps et valorisent différemment le passé, le présent et l’avenir.

C. Se méfier des biais et ancres

De nombreux biais et ancres peuvent influencer les négociations. S’il s’agit de stratégies que vous pouvez utiliser à votre profit, il convient également de ne pas se laisser piéger par ces derniers.

En effet, le cerveau humain a une fâcheuse tendance à vouloir faire des raccourcis et à traiter des informations de façon intuitive et parfois trop rapide. Parmi ces biais et ancres, on retrouve par exemple l’aversion à la perte qui influence bon nombre d’entre nous puisqu’en moyenne l’humain des plus sensible à la perte qu’aux perspectives de gains, le biais d’engagement qui nous pousse, une fois que nous avons consacré du temps et de l’énergie à un sujet, à ne pas vouloir l’abandonner (y compris lorsque l’on devrait) ou encore le biais de confirmation qui invite notre cerveau à n’assimiler que les informations qui vont dans le sens ou confirment une intuition première.

Enfin, le plus connu en négociation reste le biais d’ancrage. Une ancre est une information que vous allez considérer comme un point de référence. Dans le cadre d’une négociation, cette ancre c’est souvent le prix. On entre ainsi dans le « first offer dilemma » (voir cet article d’avril 2023 sur le sujet), autrement dit : dois-je communiquer une offre en premier ou non ? Sauf à ce que vous soyez dans une position extrêmement dominante, il est généralement déconseillé, sur un point de négociation, de dégainer sa proposition en premier.  En effet, la première proposition servira d’ancre et il vous sera alors difficile de converger sur une position mutuellement satisfaisante en vous éloignant de cette ancre.

D. Avoir confiance en soi..et en son offre !

Enfin, pour négocier efficacement, vous devez connaître et être convaincu de la valeur de ce que vous proposez, tout en ayant une connaissance assez précise du marché et des alternatives qui s’offrent à votre cocontractant.

Cette connaissance de votre marché et conviction produit vous donneront une confiance vous permettra de justifier vos demandes, faire face efficacement aux objections, et in fine d'éviter d'accepter une offre qui ne reflète pas la véritable valeur de vos services ou produits.

4. Closing et signature : le grand final !

« Arriver dans la surface et ne pas pouvoir tirer au but, c'est comme danser avec sa soeur ». Certes, l’expression est désuète et on ne peut plus maladroite. Cependant, elle a le mérite d’avoir été prononcée par le regretté Diego Maradona, d’être extrêmement imagée et surtout très applicable à la négociation.

En effet, négocier c’est bien, conclure c’est mieux. Pour éviter de miser sur un malentendu comme Jean-Claude Duss, il vaut mieux une nouvelle fois se tourner vers Sun Tzu pour qui « parvenir à battre son adversaire sans l'avoir affronté est la meilleure conduite ».

Une fois cette négociation terminée ou à minima les principaux points derrière vous, il vous faudra aller au bout, conclure, en toute délicatesse. Pour cela, de nombreuses ruses et subterfuges existent. Dans de nombreux secteurs, les armes les plus souvent dégainées sont les deadlines (cette offre spéciale expire le XX/XX/XXXX) et incentives (nous vous offrons les deux premiers mois), de précieux atouts pour parvenir au closing.

Ces deadlines et incentives jouent sur ce que l’on appelle le « FOMO » (pour Fear Of Missing Out). Une nouvelle fois, nous sommes sur un biais cognitif relevant de la peur, cette fois-ci la peur de passer à côté d’une opportunité. Il s’agira donc, de comprendre ce qui motive votre cocontractant, son MDO (Most Desired Outcome), afin de trouver ce qui peut permettre de conclure la négociation. Il peut s’agir d’un prix, d’un délai, d’une quantité, etc.

Une fois le sujet réglé, il ne reste qu’à parapher et signer, que ce soit en live en dernière page du contrat (pour peu que vous ayez la capacité ou pouvoir de signature adéquat) ou via une signature électronique.

5. Conclusion :

De nombreux acronymes, d’origine anglo-saxonne, peuvent être gardés en tête en matière de négociation, qu’il s’agisse du BATNA (cf. Chapitre 2.C ci-dessus) afin de préparer ses négociations, BPA/LAA (Best Possible Agreement et Least Acceptable Agreement) pour envisager le meilleur et le pire, ou encore du FOMO (cf. Chapitre 4 ci-dessus).

Nous pouvons, afin de conclure, introduire un nouvel acronyme (promis, c’est le dernier) à garder en tête pour réussir ses négociations. Il est assez facile à retenir car il s’agit de négocier sans peur, et donc d’approcher une approche dite « NO-FEAR », dans laquelle « F » correspond à Fear (la peur), « E » correspond à l’Ego, « A » correspond à l’Attachement, et « R » à la réaction. Il faut donc, pour réussir une négociation : éviter d’avoir peur, mettre de côté son égo, ne pas s’attacher à un deal ou un contrat, et éviter toute réaction trop spontanée.

Rédigé par
Pierre Marchès
,
CEO

Avant d'être entrepreneur, Pierre a évolué au sein d'une dizaine de directions juridiques ce qui lui a permis de rédiger, négocier et signer des tonnes de contrats.. mais aussi de comprendre les freins et pénibilités inhérentes à la gestion de contrats.

Quelles sont les trois phases clés de la contractualisation ?

1. Phase précontractuelle : les deux parties rédigent les clauses du contrat et les négocient.2. Phase de contractualisation : les parties se mettent d’accord sur les conditions du contrat et le signent.3. Phase de suivi de l’exécution : suivi des échéances et prévention des risques juridiques et financiers pouvant résulter d’un manquement à une obligation du contrat.

Qu’est-ce que la gestion de contrats ?

La gestion de contrats est l’action qui consiste à créer, à négocier des contrats puis à suivre leurs exécutions et anticiper leurs échéances clés.

Comment gérer vos contrats ?

En utilisant un logiciel de gestion des contrats tout-en-un, sur lequel centraliser et automatiser vos processus juridiques tout au long de vos cycles contractuels.

Découvrez aussi...